Agent(s) responsable(s) et transmission
Le mildiou de la pomme de terre est provoqué par Phytophthora infestans. C’est un Oomycète produisant du mycélium et ayant deux types de souches, A1 et A2, qui sont de compatibilité sexuelle opposée. La rencontre de types sexuels compatibles sur une plante peut conduire à la formation d’oospores (photo 1), qui constituent des formes de résistance issues de la reproduction sexuée, qui peuvent se conserver plusieurs années dans le sol. Toutefois, cette forme de conservation reste peu fréquente, tout au moins en France.
La plupart du temps, le cycle de P. infestans est végétatif. Pendant l’hiver, P. infestans se conserve habituellement sous forme de mycélium asexué dans les tubercules laissés au champ, les tas de déchets, les repousses ou dans les tubercules conservés en stockage. Au printemps, le mycélium survivant produit des sporanges qui sont disséminés par le vent et la pluie, et qui infectent de nouvelles plantes et cultures. En conditions de forte humidité, un cycle se produit tous les 4 à 6 jours à la température moyenne de 15 °C. Après l’infection primaire, des cycles de contamination secondaire peuvent se succéder et causer une épidémie avec une destruction très rapide du feuillage. Par la suite, au champ, les tubercules nouvellement formés peuvent être infectés par les sporanges produits sur les parties aériennes des plantes et transportés par l’eau de pluie dans le sol pour infecter les tubercules.
La pomme de terre et la tomate sont les seules plantes hôte de cet agent pathogène.
Au vu de l’impact potentiel des épidémies de mildiou de la pomme de terre et de la capacité d’adaptation rapide de son agent causal, Phytophthora infestans, d’importants dispositifs d’épidémio–surveillance sont mis en place, au niveau français mais aussi international (cf. par exemple, le réseau européen Euroblight). Ces réseaux collaboratifs permettent de caractériser et de suivre l’évolution de la structure génétique et phénotypique des populations présentes en culture pour améliorer les connaissances sur le pathogène et son adaptation (évolution des traits de vie, résistance aux fongicides, contournement de gènes de résistance variétale) et d’intégrer ces informations dans les stratégies de lutte.
Symptômes en végétation
Sur la face supérieure des feuilles, on observe de petites taches décolorées qui brunissent et sont entourées d’un halo vert-clair (photo 2).
À la face inférieure, en conditions humides, les fructifications asexuées de P. infestans (sporangiophores et sporanges) apparaissent sur le pourtour des taches et donnent un feutrage blanc caractéristique. La multiplication du nombre de taches, leur extension puis leur dessèchement peut conduire rapidement à la destruction du feuillage (photo 3).
Sur les tiges (photo 4) et les bouquets terminaux (photo 5), des taches brunes, parfois nécrotiques, sont souvent observées, également porteuses de fructifications par temps humide.
Les symptômes sur feuilles causés par Botrytis cinerea peuvent être confondus avec ceux provoqués par le mildiou, Phytophthora infestans. Des conditions fraîches et humides favorisent nettement Botrytis cinerea, agent responsable de la pourriture grise. Néanmoins, ce champignon saprophyte a tendance à infecter les parties fragiles et sénescentes de la plante.
Symptômes sur tubercule
Extérieurement, les tubercules atteints présentent des taches au contour mal défini (marbrures), de couleur brune ou gris-violacé qui peuvent être un peu déprimées (photos 6 et 7).
À la coupe de tels tubercules, on observe des zones de chair marbrée de couleur rouille juste sous l’épiderme mais elles peuvent s’étendre vers le centre du tubercule (photos 7 et 8).
D’autres agents pathogènes peuvent ensuite se développer et provoquer des pourritures humides si la récolte est mal séchée.
Facteurs de risques
Les facteurs favorables au mildiou sont notamment des températures de l’ordre de 15-20 °C et une forte humidité.
Selon la température, les sporanges germent directement ou libèrent des zoospores biflagellées.
En conditions optimales, la durée du cycle infectieux est de 3 à 5 jours, ce qui explique le caractère explosif des épidémies et le développement très rapide de la maladie.
La sensibilité de la majorité des variétés de pomme de terre cultivées (de très sensibles à moyennement sensibles) est un facteur majeur dans le développement épidémique du mildiou de la pomme de terre.
Moyens de lutte
La lutte contre le mildiou de la pomme de terre doit combiner différentes méthodes préventives et une bonne prophylaxie :
- choix de variétés résistantes ou tolérantes, lorsqu’elles sont disponibles ;
- utilisation de plants sains ;
- gestion des tas de déchets et des repousses dans les cultures voisines ;
- bon buttage pour limiter la contamination des tubercules-fils en fin de culture ;
- protection chimique du feuillage appliquée préventivement tout au long de la période de culture lorsque la pression de maladie le nécessite. De nombreux fongicides sont efficaces sur le mildiou et ils doivent être utilisés selon leur préconisation et leur mode d’action : fongicides de contact (par exemple dithiocarbamates, produits à base de cuivre et autres), fongicides pénétrants, diffusants ou systémiques. L’application des produits doit être raisonnée en fonction du risque épidémique, de la sensibilité variétale et du risque de résistance des populations de P. infestans à certains fongicides, et en particulier des fongicides à mode d’action unisite utilisés dans des parcelles où le mildiou est déjà présent ;
- pendant la période de culture, il est vivement recommandé de prendre en compte les prévisions météorologiques et les outils de prévision des risques de maladie pour adapter la protection. A moins d’inspecter régulièrement l’environnement des cultures de pomme de terre pour vérifier l’absence de maladie, il est conseillé de s’abonner à un bulletin d’épidémiosurveillance ou d’utiliser un outil d’aide à la décision ;
- afin de protéger la culture jusqu’à la récolte, la protection fongicide doit être assurée jusqu’à la destruction complète du feuillage (feuilles et tiges).
Importance économique
Parasite de répartition mondiale, le mildiou de la pomme de terre demeure la maladie la plus difficile à maîtriser en production de pomme de terre. Le mildiou constitue une menace partout où la pomme de terre est cultivée et particulièrement pour les cultures en climats tempérés, doux et humides. En pression élevée de maladie, la maîtrise du mildiou nécessite des traitements chimiques préventifs, répétés et coûteux, alors qu’une lutte inefficace peut se traduire dans des dégâts économiques importants pouvant aller jusqu’à la perte complète de la production.
En production biologique, la maîtrise du mildiou constitue souvent l’une des principales préoccupations du fait du manque de fongicides autorisés, en dehors des produits à base de cuivre.