Maladie de la chip zébrée ou du « Zebra chip » (Zebra chip disease)

Candidatus Liberibacter solanacearum

Type d'organisme : Bactéries

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Agent(s) responsable(s) et transmission

Candidatus Liberibacter solanacearum (ancienne dénomination Liberibacter psyllaurous) est une bactérie de la famille des Phyllobacteriaceae responsable de désordres végétatifs sur Solanacées et apiacées. C’est une bactérie gram négative, non cultivable (parasite obligatoire des plantes), restreinte au phloème des plantes et à l’hémolymphe des insectes vecteurs. Elle est transmise à son hôte par des insectes vecteurs, les psylles (ordre des Hémiptères).

Les études de polymorphisme menées sur le génome de la bactérie ont permis la description de 7 haplotypes, A, B, C, D, E, F et U :

Les haplotypes C, D, E et U sont inféodés aux cultures d’Apiacées. L’haplotype C est associé aux cultures de carotte dans les pays d’Europe du Nord ; le vecteur de la bactérie dans ces régions est Trioza apicalis. Les haplotypes D et E sont décrits sur cultures de carotte, céleri, fenouil, cerfeuil, persil, panais et sont présents en Europe du Sud, en Afrique du Nord (Maroc et Tunisie) et en Israël ; ils sont associés au psylle Bactericera trigonica. L’haplotype U, récemment décrit, a été détecté en Finlande sur ortie (Urtica dioica) et dans des psylles de l’espèce Trioza urticae.

Bien que les haplotypes C et E aient été détectés sur des tubercules (symptomatiques et asymptomatiques) et des repousses de pomme de terre en Finlande et en Espagne, différentes études montrent que la transmission de la bactérie entre des plantes hôtes appartenant à des familles différentes est très limitée, les espèces de psylles vectrices étant souvent associées à une seule famille de plantes et à certains haplotypes de la bactérie.

La dispersion naturelle de la bactérie est principalement liée à celle de son vecteur et peut être très rapide dès lors qu’il est présent. L’acquisition de la bactérie par l’insecte vecteur se fait au moment de la prise alimentaire. Le psylle se nourrit au niveau du phloème de l’hôte et ingère la bactérie présente dans les vaisseaux de la plante infectée. Les bactéries vont ensuite traverser la paroi du canal alimentaire, se déplacer via l’hémolymphe jusqu’aux glandes salivaires de l’individu. Elles pourront alors infecter une nouvelle plante hôte lors d’une nouvelle prise alimentaire de l’insecte. Les bactéries peuvent aussi être transmises à la descendance d’une femelle de psylle infectée par voie transovarienne.

Bactericera cockerelli (photos 5 et 6) peut avoir entre 3 et 7 générations par an, un cycle durant entre 3 et 5 semaines. Les insectes se déplacent de plante en plante et l’expansion de la maladie dans les parcelles est alors très rapide. Bactericera cockerelli est polyphage et peut être trouvé sur des espèces végétales appartenant à plus de 20 familles botaniques, en particulier sur Solanaceae, Convulvolaceae, Lamiaceae. Il va se nourrir et hiverner sur ces plantes dont certaines peuvent être infectées par la bactérie et constituer alors des réservoirs (cas du liseron et du datura par exemple).

La bactérie peut également être transmise par le matériel de propagation (tubercules, plants de tomate, de poivron, de piment) et par greffage. Cependant, la transmission de la bactérie par le tubercule de pomme de terre reste très faible car les plantes issues de tubercules infectés sont souvent chétives et meurent rapidement limitant ainsi la dissémination de la bactérie.

Symptômes en végétation

Les symptômes observés en végétation sont proches de ceux décrits sur des plantes infectées par les phytoplasmes. La manifestation des symptômes est variable et dépend de différents facteurs, notamment les conditions environnementales, la variété, la pression des vecteurs. Les plantes présentent un retard de croissance, un port érigé et un rougissement des extrémités apicales (photo 1). Des zones chlorotiques et des marbrures apparaissent sur les feuilles, qui peuvent parfois aussi s’enrouler. Les tiges ont souvent des formes en «zig zag», des entre noeuds courts et épaissis et des tubercules aériens. Les plantes fortement infectées ont un feuillage qui parait brûlé (photo 2). Des flétrissements peuvent aussi être observés. Les plantes peuvent rester asymptomatiques lorsque la pression bactérienne est faible.

Symptômes sur tubercule

Les tubercules issus de plantes infectées sont souvent petits, nombreux, déformés et avec des stolons courts. La peau des tubercules est rugueuse. Une diminution de la dormance est observée provoquant une germination prématurée des tubercules et la formation de germes frêles et peu nombreux. Le point d’attache du stolon est marqué et rosâtre. La manifestation des symptômes sur tubercules est un brunissement de l’anneau vasculaire associé à des taches nécrotiques du tissu interne et des stries au niveau de la zone médullaire (photo 3). Les symptômes sont plus prononcés aprs friture et ont donné leur nom à la maladie (photo 4).

Facteurs de risques

Le principal risque de contamination d’une région ou d’un pays par la maladie du Zebra Chip est l’introduction du vecteur Bactericera cockerelli. Les mouvements de plantes d’une zone où la présence du psylle est notifiée vers une zone non contaminée constitue le risque majeur d’introduction du vecteur qui peut être présent sur les parties vertes du matériel végétal transporté (aux stades adulte, œuf ou nymphe). La dissémination de la bactérie peut se faire aussi au travers des échanges commerciaux de matériel destiné à être replanté (tubercules de pomme de terre, plants de tomates) ou par greffage de tomates ou poivrons.

Les vêtements ou tenues de travail peuvent constituer des moyens pour véhiculer les insectes mais seulement sur des zones géographiques restreintes.

La présence dans l’environnement des cultures de repousses de pomme de terre et d’adventices appartenant aux familles des Solanaceae, Convulvolaceae, Lamiaceae constitue un réservoir possible pour la bactérie et son vecteur pour se maintenir et contaminer ensuite les cultures hôtes environnantes.

Moyens de lutte

La lutte contre cette maladie repose avant tout sur l’application de mesures préventives pour éviter l’introduction et la dissémination de la bactérie Candidatus Liberibacter solanacearum (haplotypes A, B et F) et son vecteur Bactericera cockerelli dans les zones géographiques où ils ne sont pas présents.

La classification de B. cockerelli comme Organisme de Quarantaine Prioritaire au niveau de l’Union Européenne par le Règlement Santé des Végétaux 2016/2031 permet la mise en place de contrôles lorsque du matériel végétal est importé de pays et régions où la maladie sévit. Des méthodes performantes de détection et d’identification de la bactérie et du vecteur ont été développées et peuvent être utilisées pour vérifier la qualité sanitaire du matériel importé et/ou destiné à être cultivé ou multiplié.

Les moyens de lutte appliqués dans les régions où la maladie est présente reposent surtout sur le contrôle du vecteur avec la mise en place de mesures comme :

La lutte préventive vis-à-vis de cette maladie repose aussi sur une communication des connaissances acquises sur la bactérie et son vecteur auprès des acteurs des filières concernées afin de les sensibiliser sur les conséquences importantes liées à l’introduction de la bactérie et son vecteur dans les régions indemnes.

Importance économique et réglementation

La maladie du Zebra Chip a été décrite pour la première fois au Mexique en 1994. Elle s’est propagée ensuite à plusieurs pays d’Amérique centrale (Mexique, Salvador, Nicaragua, Honduras, Guatemala, Equateur), d’Amérique du Nord (Etats-Unis et plus récemment au Canada) ainsi qu’en Océanie (Nouvelle Zélande et île de Norfolk). L’aire de répartition de Bactericera cockerelli est plus étendue que celle des haplotypes Solanacées de la bactérie puisque ce vecteur a également été décrit en Australie ainsi que dans des états des USA et des régions du Canada où la bactérie n’a pas encore été notifiée. Les haplotypes A, B et F de Candidatus Liberibacter solanacearum ainsi que leur vecteur Bactericera cockerelli n’ont pas été signalés en Europe sur cultures de pomme de terre ou autres Solanacées.

La maladie du Zebra Chip est responsable de pertes économiques très importantes dans les pays où elle survient, d’une part par les dégâts provoqués sur les cultures (baisses de rendements pouvant atteindre 80% et des récoltes non commercialisables et impropres à la transformation) mais également par les traitements insecticides appliqués pour lutter contre Bactericera cockerelli.

Le Règlement Santé des Végétaux 2016/2031 en vigueur au niveau de l’Union Européenne depuis le 16 décembre 2019 classe la bactérie Candidatus Liberibacter solanacearum (quel que soit l’haplotype considéré) comme organisme réglementé non de quarantaine mais pour lequel la tolérance est nulle. Le vecteur Bactericera cockerelli est quant à lui classé comme organisme de quarantaine prioritaire.