Jambe noire et pourriture molle (Blackleg and Soft rot)

Pectobacterium spp. et Dickeya spp.

Type d'organisme : Bactéries

Méthode de détection : ELISA, Isolement, PCR

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Agent(s) responsable(s) et transmission

Les maladies de la jambe noire et des pourritures molles sont causées par des bactéries appartenant aux genres Pectobacterium (P.) et Dickeya (D.).

Sur pomme de terre, Pectobacterium atrosepticum a été pendant longtemps l’espèce majoritairement associée à la jambe noire en Europe et Pectobacterium carotovorum à celui de la pourriture molle alors que le genre Dickeya sp. était plutôt inféodé à des climats chauds. Toutefois, d’autres espèces des genres Pectobacterium et Dickeya peuvent également causer des symptômes de jambe noire sur tiges et de pourritures molles de tubercules.

Le complexe d’espèces associées à ces maladies compte actuellement 17 espèces rapportées à travers le monde (5 espèces de Dickeya et 12 espèces de Pectobacterium). Parmi ce cortège bactérien, certaines espèces sont identifiées de façon sporadique alors que 8 le sont de façon plus fréquente sur le continent européen.

Les espèces les plus couramment associées aux symptômes sur pomme de terre sont P. atrosepticum, P. brasiliense, P. parmentieri, D. dianthicola et D. solani. Dans une moindre mesure les espèces P. carotovorum, P. polaris et P. versatile peuvent également être isolées des symptômes.

Le développement de la pourriture molle des tubercules qui peut se produire au cours du stockage ou en végétation est classiquement associé aux bactéries P. carotovorum et P. versatile. Les espèces P. polaris, P. brasiliense, P. parmentieri ainsi que D. dianthicola et D. solani peuvent également être impliquées.

Les tubercules constituent une source potentielle importante d’inoculum. D’autres sources et vecteurs de contaminations tels que l’eau, le sol, des adventices et plantes cultivées ont également été mis en évidence.

Certains insectes ont par ailleurs été identifiés comme pouvant être porteurs des bactéries. La mécanisation constitue un facteur important de contamination.

La plantation, la récolte et le tri mécanique des tubercules peuvent être la cause de la propagation des pathogènes. Cette contamination a principalement lieu lors du contact de tubercules sains avec des tubercules et/ou du matériel infectés.

Espèces de Pectobactorium décrites sur pomme de terre

Espèces et sous-espècesTempératures de développementCultures hôtes (et présence décrite dans l’eau)Répartition géographique sur pomme de terre
P. atrosepticum15 °C – 25 °CEurope, Amérique
P. versatile25 °C – 40 °CPomme de terre, endive, poireau, laitue, jacinthe, artichaut, carotte, chou, iris, eau, chrysanthème, primevère, cyclamenEurope, Amérique, Asie
P. polaris20 °C – 40 °CPomme de terre, morelle douce amèreEurope, Asie
P. parvum20 °C – 40 °CPomme de terre, chou, tournesolEurope
P. brasiliense25 °C – 40 °CPomme de terre, piment, poivron, chou, betteraveà sucre, courgette, eau, banane, chrysanthèmeEurope, Amérique, Asie, Afrique
P. peruviense20 °C – 40 °CPomme de terre, eauAmérique
P. punjabense25 °C – 40 °CPomme de terreEurope, Asie
P. parmentieri25 °C – 40 °CPomme de terreEurope, Amérique, Océanie
P. odoriferum20 °C – 40 °CPomme de
terre, endive,
betterave,
poireau
céléri, laitue,
jacinthe,
artichaut,
carotte,
oignon, persil,
chou
Europe
P. carotovorum20 °C – 40 °CPomme
de terre,
chou, navet,
cyclamen, eau
Europe, Amérique, Asie
P. aroidearum20 °C – 40 °CPomme de
terre, avocat,
tomate, tabac,
bananier,
plantes
ornementales
(ornithogale,
arum,
philodendron,
dieffenbachia)
Europe, Amérique, Afrique
P. betavasculorum25 °C – 40 °CPomme de terre,
betterave à
sucre, tournesol,
artichaut
Europe

Espèces de Dickeya décrites sur pomme de terre

Espèces et sous-espècesTempératures de développementCultures hôtes (et présence décrite dans l’eau)Répartition géographique sur pomme de terre
D. dianthicola25 °C – 40 °CPomme de
terre, tomate,
endive,
artichaut,
dahlia,
kalanchoe
Europe, Amérique, Asie
D. solani25 °C – 40 °CPomme
de terre,
jacinthe, iris
Europe, Amérique, Asie
D. dadantii25 °C – 40 °CPomme de
terre, tomate,
maïs, ananas,
banane, patate
douce, plantes
ornementales
(dieffenbachiae,
pelargonium,
oeillet, euphorbe,
philodendron)
Europe, Amérique, Afrique
D. zeae25 °C – 40 °CPomme de
terre, maïs,
ananas,
banane,
tabac, riz,
chrysanthème,
brachiaria, eau
Océanie
D. chrysanthemi25 °C – 40 °CPomme de terre,
endive, tomate,
artichaut,
tournesol,
parthenium,
philodendron,
eau
Europe, Amérique, Asie

Symptômes en végétation

Les attaques précoces du parasite peuvent faire pourrir les tubercules-mères et provoquer des manques à la levée.

Le symptôme le plus typique est celui de la jambe noire (photo 1) . Ce symptôme varie d’une pourriture humide brun foncé de la base des tiges à des nécroses plus ou moins sèches selon les conditions climatiques (photo 2). L’extériorisation des symptômes n’est pas systématique et, dans certains cas, seules des nécroses internes se développent, éventuellement doublées d’un phénomène de « tige creuse » lié à la dégradation de la moelle (photo 3). Des jaunissements, et/ou flétrissements, enroulements, du feuillage sont classiquement associés au phénomène de jambe noire (photos 4 et 5) et ces phénomènes permettent souvent de repérer en premier lieu les plantes malades.

Alors que les conditions humides entraînent préférentiellement la manifestation de pourritures, des conditions chaudes et sèches favorisent le développement de flétrissements.

Symptômes sur tubercule

Les symptômes sur tubercules se caractérisent par des pourritures molles internes débutant souvent à partir du stolon en cours de culture (photo 6). La pourriture humide et granuleuse est de couleur blanche à crème, noircissant en périphérie du tissu malade (photo 7).

D’autres organismes saprophytes se surajoutent rapidement et entraînent la formation d’odeurs nauséabondes et de mucosités. Lors d’excès d’eau en terre ou en stockage, on peut observer des pourritures lenticellaires (photos 8 et 9) .

Facteurs de risques

Les principaux facteurs de développement des bactéries Pectobacterium et Dickeya responsables de la jambe noire et des pourritures sur tubercules sont l’humidité du milieu, des températures correspondant aux optimums thermiques des espèces pathogènes, ainsi que les conditions asphyxiantes, qui favorisent la multiplication des populations bactériennes jusqu’à un niveau critique à partir duquel va s’exprimer la maladie. Le développement préférentiel de l’une ou l’autre bactérie dépend notamment des facteurs climatiques et en particulier de la température.

Les espèces bactériennes appartenant au genre Pectobacterium présentent globalement des températures optimales de développement comprises entre 20 et 40 °C à l’exception de P. atrosepticum, qui, avec des températures d’expression de 15 à 25 °C est plutôt inféodée aux régions tempérées.

Les espèces de Dickeya spp. se développent à des températures comprises entre 25 et 40 °C. Initialement décrites dans les zones tropicales et subtropicales, elles s’expriment aussi fréquemment en climat tempéré à la faveur de périodes chaudes.

Le développement de la maladie dépend aussi de la sensibilité de la variété (ou génotype) de pomme de terre vis-à-vis des espèces bactériennes présentes.

Les tubercules peuvent être la source d’inoculum primaire mais les pathogènes peuvent également être présents dans l’environnement. Pectobacterium et Dickeya ont été mis en évidence dans l’eau (rivières, réservoirs) mais survivent peu dans un sol nu. Pectobacterium colonise les racines de très nombreuses espèces de plantes. Les gammes d’hôtes varient selon les espèces : très large pour P. carotovorum, P. versatile, P. brasiliense, D. dianthicola, elle est restreinte dans le cas de P. atrosepticum, P. polaris, P. parmentieri et D. solani. Dans le cas de D. solani, son émergence sur pomme de terre est probablement liée à son passage sur cet hôte à partir de cultures de plantes ornementales aux Pays-Bas. La contamination des tubercules au champ à partir du jeune matériel indemne de bactéries suggère la présence dans l’environnement de plantes réservoirs, susceptibles d’héberger, sans les exprimer, les pathogènes. Les bactéries relarguées dans l’environnement colonisent alors la pomme de terre, notamment via le sol ou les eaux de surface.

Moyens de lutte

La maîtrise de la maladie repose d’abord sur la combinaison de mesures prophylactiques au cours de l’itinéraire cultural :